Tout d’abord une question. LA question. Comment diminuer radicalement nos déplacements et les déplacements de nos produits de consommation qui génèrent les transports routiers ?
La diminution de nos déplacements signifie d’abord travailler près de chez soi, ou habiter près de son lieu de travail, ce qui n’est pas forcément la même chose. « Pour ses déplacements, un périurbain émet quotidiennement deux à trois fois plus de CO² qu’un habitant du centre-ville » (Le Monde du 18-10-2006, p. 20). Vouloir faire habiter (et travailler) les gens à la ville plutôt que de les faire travailler (et habiter) à la campagne constitue une fuite en avant vers le tout urbain vouée à l’aberration écologique, et dictée par des impératifs économiques soi-disant indépassables (voir plus loin).
Diminuer les déplacements de nos produits de consommation signifie d’une part consommer des produits locaux, d’autre part, consommer moins. Dans les deux cas c’est le mode de production concentrée, monopolisée, qui est mis en cause, avec son corollaire publicitaire.
Evident ? Pas pour tout le monde. Dans le registre « quand la raison économique l’emporte sur les impératifs écologiques vitaux », le rapport de l’IFEN propose de faire face à un « défi urgent » : « dissocier la croissance économique des émissions de gaz à effet de serre, des pollutions et de la consommation des ressources ». Pour cela, affirme le rapport, « des marges de manœuvre existent. Elles nécessitent un changement profond des comportements, des technologies, des modes de vie et de production »… Tout en étant compatibles avec la croissance économique donc ? C’est incohérent. Déjà Hubert Reeves disait en 2003 : « l’expression ‘croissance économique durable’ est une absurdité » (Mal de terre, page 31). Et le plus étonnant est que justement à propos du rapport de l’IFEN de mai 2002, H. Reeves notait : « il ressort surtout de ce document que le retour d’une forte croissance en France entre 1998 et 2001 s’est soldé par une dégradation de l’environnement, ce qui montre que le couple ‘croissance économique’ et ‘respect de l’environnement’ ne fait pas bon ménage » (id. page 247, note 22).
La diminution de la consommation suppose tellement de changements dans nos représentations autant que dans notre mode de vie, sans compter l’inertie des structures économiques fondées sur la croissance, que la lecture de certains journaux s’avère plus que recommandée. Des journaux tels que :
La Décroissance (site : http://www.casseursdepub.net/journal/ ) , en kiosque ;
Silence ! (site : http://www.revuesilence.net/ ) ;
ou L’âge de faire (site : http://www.lagedefaire.org ), deux publications disponibles par abonnement ou en magasins d’alimentation biologique ;
Passerelle Eco (site : http://www.passerelleco.info ), sur abonnement.
Le passage du début à la fin du XXème siècle, au-delà d’une croissance exponentielle de nos rejets de GES, s’est caractérisé par l’avènement de la croissance économique et de la consommation.
Comment faire « marche arrière » pour limiter nos déplacements et pour consommer moins afin de rejeter moins de GES, sans pour autant perdre systématiquement tous les acquis technologiques, notamment lorsqu’ils sont peu émetteurs de GES ?
Comment passer du credo « croissance et consommation… et réchauffement » à la ligne de conduite vitale « simplicité et partage… et diminution de l’effet de serre » ?
En quoi le mode de vie du début du XXème siècle permettait-il de produire bien moins de GES que notre mode de vie du début du XIème siècle ?
La disparition quasi intégrale de l’artisanat local, y compris agricole, en constitue une différence majeure : filières courtes et écologiques. La réinvention de cet artisanat, local, est le vecteur le plus évident pour nous faire retrouver un mode de vie écologiquement viable. Et c’est bien au niveau territorial que des politiques de relance de l’artisanat (pas seulement artistique : utilitaire aussi) peuvent être menées avec le plus d’efficacité possible (formation des jeunes, débouchés garantis par des mesures locales de communication, d’entre aide économique etc.) Même le film « Une vérité qui dérange », Al Gore et le site http://www.criseclimatique.fr/ ne remettent pas en cause cette économie délocalisée ni nos comportements induits, autant dire notre mode de vie : salariat dans de grandes et rares entreprises situées à plusieurs dizaines de kilomètres de chez nous, induisant une société du « tout bagnole », et recours à des machines à haute performance technologique et à des produits, y compris alimentaires, fabriqués dans des lieux centralisés et coûteux en déplacement, générant des transports en fabrication et en distribution à la vente. Voir les 3000 km parfois dénoncés pour fabriquer un pot de yaourt.
- la population mondiale a doublé depuis 1950, et la politique de croissance économique nous incite en permanence à relancer la natalité. Les seuls motifs de cette politique nataliste sont des critères économiques qui essaient de nous faire croire que la relance de l’économie diminuera les inégalités alors que c’est historiquement faux, si l’on regarde l’évolution depuis la fin des 30 glorieuses. L’article du Monde sur le rapport de l’IFEN se termine ainsi : en Europe, la « quantité de ressources non renouvelables ne faiblit pas : l’augmentation de population, la demande en produits plus diversifiés et à plus fort renouvellement annihilent les efforts et les progrès réalisés par certaines entreprises ».
- Répartir les richesses, seul moyen pour promouvoir et pour financer, rapidement et massivement, une politique de décroissance économique et démographique semble bien être le passage obligé pour sortir de l’impasse écologique dans laquelle nous sommes engagés : il faut le dire et le répéter aujourd’hui pour le faire demain. Si ces orientations vont à l’encontre de l’idéologie dominante de la croissance économique (et elles y vont, quoiqu’en dise Al Gore), c’est l’idéologie de la croissance économique qu’il faut abandonner.
Merci de faire suivre à volonté à vos collectivités régionales, départementales ou locales.